La bête. Montaigne écrit qu’Aristote écrivit : « Il faut (…) toucher
sa femme prudemment et sévèrement, de peur qu'en la chatouillant trop
lascivement le plaisir la fasse sortir hors des gonds de raison ».
Dans le film La bête de Walerian Borowczyk, la femme, pour sortir des gonds, n’a pas besoin
d’être touchée. Elle peut le faire tout seule. Ce film culte des années 70, mis
en dvd en 2001 dans sa version
intégrale (l’énorme sexe de la bête que dans la version grande salle on
devinait à peine, est ici étalé dans toute sa dureté) raconte l’histoire d’une
jeune Américaine qui arrive dans un château français pour marier le descendant
pas tout à fait normal (il a une queue, vraie), d’une famille aristocratique
dont une des ancêtres tua La bête en l’aimant. La jeune Américaine
envahie par l’esprit de cette insatiable bête (la fausse, la femme) fera mourir
dans les affres du plaisir le rejeton à queue. Tout, ou presque, se passe dans
les rêves de la jeune insatiable.
Les stéréotypes ne
manquent pas : le serveur noir que la gigolette de la famille emploie pour
en venir à ses impropres fin ; l’étalon noir qui lèche la vulve
frémissante ; les hurlements de la bête noire (ours ?) dans les
grâces de laquelle la jeune marié tombera ; la rose qui se fane et se perd
dans le rose intime ; l’ancien livre poussiéreux qui cache l’image de la
bête obscène ; la tante plus ambiguë qu’elle n’en a l’air (« nous
aussi on se lave l’une l’autre ») ; la musique impudique de Scarlatti
qui accompagne les scènes bestiales ; l’agneau que les pattes (noires)
déchirent ; le baiser du prêtre rubicond sur la bouche de
l’adolescent ; le mouvement ondulatoire des arbres qui accompagne le
plaisir sauvage ; le voile déchiré dans un sommeil trop parfaitement
agité…