24 septembre 2001. Questions d’étudiant. Pauvre étudiant ! et pourtant il a une mère qui l’aime (et, peut-être, même une femme). Que faire, quand on voit une fermeture si parfaite, si lisse ? Que dire devant l’ignorance de son ignorance, sans limites ? Le caresser comme un petit animal ? Le mépriser comme on méprise ceux qui méprisent ? Avoir de la compassion ? Comme une fleur, le tuteurer ? Ou, plus simplement, penser que penser et connaître n’ont jamais fait d’un homme un homme ? Ou, encore plus simplement, penser que même ceux qui laissent les mots pourrir dans leurs livres et dans leurs discours, seulement parce qu’ils sont gratuits, ont une mère qui les aime (et, peut-être, même une femme) ?

 

25 septembre 2001. Aimer. On ferait n’importe quoi pour croire que les autres nous aiment. Même les aimer.

 

26 septembre 2001. Les ailes du désir. On n’écrit que sur l’enfance ou à partir de l’enfance. On écrit en retournant à l’enfance. Banal. Manuel Rivas, La langue des papillons : « […] avec l’illusion qu’un jour il me pousserait des ailes et que je pourrais arriver à Buenos Aires. » Qu’est-ce que Buenos Aires ? Pour Manuelito, un son et un mystère. Pour le lecteur une ville. Pour l’écrivain un son et un mystère devenus ville. Moi aussi, je rêvais d’ailes : «  […] avec l’illusion qu’un jour il lui pousserait des ailes et qu’elle pourrait entrer par la fenêtre. » Et j’attendais, immobile, qu’elle vienne, dans mon lit. Brigitte Bardot. Qu’est-ce que Brigitte Bardot ? Pour l’enfant de neuf ans, un corps et un mystère. Pour mes amis une conne. Pour moi le corps et le mystère qui animent les corps, des femmes.

 

27 septembre 2001. Le crayon. Le simple fait de prendre le crayon me change les idées.

 

28 septembre 2001. Différence. Avant de m’engouffrer dans des dizaines de livres sur les animaux, j’étais sûr qu’il y avait plus de différences entre deux frères jumeaux qu’entre une baleine et une cigale. Maintenant j’en doute. Je doute même qu’il y ait plus de différences entre deux inconnus qu’entre deux chiens. Je commence à penser que les seules différences sont dans les dimensions du corps. Dans ce qu’on voit et qu’on touche. Le reste n’est que différence dans celui qui observe.

 

29 septembre 2001. Je tu il.

    Tais-toi. Tu ne vois pas que tu tournes en rond ? Toujours chercher le même dans le différent c’est un exercice terrible. T’en as pas marre ? Tu ne peux pas faire autre chose ?

    Seulement si je me tu.

 

30 septembre 2001. JUPES et SLIP. Les rares fois qu’on ne me pose pas des questions très bêtes, on m’en pose de bêtes. Il semble que le « style Ik » attire les réflexions pseudo-intelligentes comme les caribous attirent les taons, en juillet. Hier soir, après un après-midi très sexué, dans son déshabillé mauve des grands jours, devant son lassant feu de cheminée, avec un sourire qui se voulait gros de désir elle m’a demandé pourquoi je n’employais jamais l’acronyme JUPES[1] « Ça fait très Ik. La première fois que je l’ai entendu j’ai cru que c’était toi qui l’avais créé », elle ajouta pour raviver ma vanité. Si on n’avait pas passé toutes ces heures à nous natter, je crois que je l’aurais sortie à coup de pieds au cul. Sans jupe, elle qui est une vraie SLIP (Seule Lubrique Invertie et Pute). Me comparer à une Marie-France Bozotte quelconque ! Moi ! Ça va pas la crête ?

 



[1] Jeunes Professionnelles Émancipées et Seules.