11 février 2002. Portail. Quand je lis des comparaisons avec les camps de concentration nazis j’ai toujours l’impression qu’on n’a pas saisi la spécificité et le niveau d’horreur atteint dans les enclos de la bête blonde. Cette impression est souvent accompagnée par un sentiment d’impuissance et par une grande amertume surtout quand on les compare aux « camps » serbes, aux attaques des Israéliens, aux horreurs staliniennes, aux massacres au Rwanda ou à la cruauté des Inquisiteurs, car il me semble que le choix d’expériences politiquement si claires, met encore mieux en évidence la difficulté de saisir le Nazisme comme la grande fête de la bestialité — humaine, humaine, très humaine, heureusement. Hier soir, je feuilletais un livre de Nietzsche pour ne pas m’endormir avant l’appel au bétifiement de Stéphane Bureau et, tout à coup, j’ai eu une image simple, claire, profonde comme la vérité : j’ai vu le portail de l’âme humaine surmonté par la phrase « Connais-toi toi-même » et le portail n’était pas un portail quelconque mais il était la grille d’Auschwitz où la célèbre invitation au voyage intérieur avait pris la place de la non moins célèbre invitation au travail :« Arbeit macht frei ».

 

« Je suis fou ! Complètement cinglé », me dis-je. « Nietzsche me rend dingue ! Que Socrate soit un décadent et un nihiliste, ça va encore, mais le comparer à Hitler ! C’est débile. » Je fermai donc le livre pour arrêter ces folles images chargées de non moins folles idées. mais je ne réussis pas à arrêter leur flux. Je ne dormis pas de treize nuits, ce qui me confirma (mais, en avais-je encore besoin ?) que la volonté ne peut se vanter de contrôler que ce qui est déjà sous contrôle. N’ayant pas la main de Godard pour filmer la confusion de mes images, je vais essayer de rapporter, le plus fidèlement possible, avec de simples et modestes mots cette descente dans l’enfer de la vérité.

 

La confusion la plus totale règne autour d’un long, long, train noir qui déverse une masse confuse d’idées, de désirs, d’espérances, de passions, d’amours, de sagesse, d’étourderie, de haine, de rêves, de velléités, de courage, de déception, d’envie, de courroux, d’illusions, de colère, de générosité, de mesquinerie, de méfiance, de penchants, de peurs, de dépits, de joies… Comme ils glissent sur terre, ces habitants de l’âme (que, à défaut d’un meilleur terme, j’appellerai Âmiens) s’étreignent, s’embrassent, se frappent, s’agglutinent. Des RR[1], les prétoriens de la raison, aboient dans une langue étrangère des ordres que les Âmiens ne comprennent pas. À coup de logique et de calcul les RR réussissent finalement à former deux longues files : d’un côté les bons sentiments et les passions constructives et de l’autre les mauvais et les passions qui aveuglent. Encore des ordres, que personne ne comprend. Le chef des RR fait sortir une bonne illusion et la déshabille sans aucun respect pour son âge. Elle baisse la tête pour couvrir ses vieux seins avec la blancheur des rares cheveux et cache ses parties cachées d’une main tremblante. Les RR courent le long des files criant et donnant des coups avec la crosse de leurs revolvers pour forcer les autres à se dénuder. Seul un jeune rêve se refuse et court dans ma direction. J’ouvre mon manteau pour le cacher mais il me traverse comme si j’étais une simple illusion. Un RR aussi passe à travers mon corps et va rejoindre le rêve pour le finir d’un coup de revolver aux temps. Deux tables sont installées devant l’entrée :

    Nom ?

    Penchant.

    Âge ?

    Trois cent mille ans.

    Religion ?

    Aucune.

    Origine ?

    Amour.

    Suivez la file !

Moi aussi je suis la file derrière Penchant sans que personne ne me voie. Pour être sûr que je suis invisible, je donne un coup de pied à un des Âmiens qui aident les RR dans leur tâche immonde : croyant sans doute que c’est un ange envoyé par Dieu qui l’a frappé, il tombe raide mort sous le regard impassible d’un RR.

 

Je passe la grille et me mélange aux flâneurs qui discutent, rient et se sourient, complètement indifférents à la RR femelle qui trie les Âmiens selon une logique obscure. Je fuis leurs échanges légers en me dirigeant vers un énorme bâtiment rococo, de l’autre côté du parvis en dalles grises, où flotte le drapeau des RR (un soleil rouge pâle et la devise summum bonum sur fond blanc). Devant l’édifice, un poteau avec trois plaques indicatrices en bois orange, comme on en voit souvent aux croisements des sentiers alpins, avec, brûlé en noir : conscient (vers la gauche), subconscient (vers la droite), inconscient (vers le centre). Dans le hall, trois hommes impeccables et une femme en décolleté jouent le deuxième mouvement du Quatuor à corde (opus 132 en la) de Beethoven. Attiré par les rires qui ne semblent pas déranger les musiciens enveloppés de leur musique raffinée, je me dirige vers le salon de droite où un vieux sale, dans une fausse joie, pose de fausses questions pour avoir de fausse réponses à une dizaine de personnes qui l’entourent et qui rient au faux humour du vieux faux maître. Même ma curiosité inébranlable ne peut me retenir après avoir entendu les phrases profondes et banales qui volètent dans la pièce.

 

Je sors.

 

Je suis la file des Âmiens qui s’enfonce dans le quartier Inconscient. À perte de vue des cubes gris, pas plus hauts qu’un mètre, avec une minuscule fenêtre en demi-lune sur le dessus. Je me penche sur un cube rue saint Augustin : l’intérieur est complètement vide, seul un Âmien, accroupi au centre du plancher, balance lentement sa tête de gauche à droite et de droite à gauche. Comme je frappe à la vitre, il lève lentement la tête mais son regard évidé ne semble pas me voir. Il reste pendant quelques minutes dans cette position inconfortable et puis il laisse retomber la tête sur ses genoux. Dans tous les cubes de la rue le même spectacle. Je tourne sur la rue Boèce où un RR attend devant un cube. Son camarade sort en rampant, il a dans un main une patène où est déposée une boule rouge, les restes d’un Âmien. La boule est glissée dans un four portable alimenté avec les feux de la raison. J’attends que les RR s’éloignent[2] pour ouvrir la porte du cube suivant où on venait d’installer un nouvel arrivé. Elle[3], me regarde avec un mépris à peine voilé de mélancolie.

    Que voulez-vous ? N’est-ce pas assez ce que vous venez de nous faire ?

    Je ne fais pas partie de leur gang. J’étais de passage quand j’ai vu qu’on vous déchargeait du train et, poussé par la curiosité, j’ai suivi la file à l’intérieur du camp. Je ne comprends pas ce qui se passe. Aidez-moi à comprendre et, quand je retournerai dans mon pays, je parlerai de vous. J’essayerai de convaincre les gens que le traitement qu’on vous réserve est comme celui des camps nazis. J’en parlerai de manière qu’il n’y aura pas d’excuses. On ne pourra pas dire « On ne savait pas » ou « Qui aurait pu imaginer ! ». Qui sont ces fous qui vous enferment ?

    Ce que vous voyez n’est pas le résultat de la folie d’un homme ou d’un peuple, ni le fruit du hasard. Tout a débuté il y a bien longtemps. Il y a bien longtemps…

Son regarde s’adoucit. Sa bouche s’étira légèrement dans un début de sourire.

    C’était l’aurore d’une nouvelle ère. Lumineuse. Azure. Les hommes déposaient les mots devant eux, les étudiaient, les aimaient et les mots les aimaient en retour Mais les mots, encore plus que les hommes, ne peuvent pas vivre isolés, chaque mot a besoin du souffle de ses voisins pour respirer. Malheureusement, pour vous, pour vous les hommes surtout, ils peuvent vivre en apnée pendant des siècles donnant ainsi l’illusion aux hommes de la connaissance. Et cette illusion les rend ivres. Ivres de connaissances. Mais sectionner, isoler, distinguer, préciser est l’œuvre démoniaque de la raison qui se retourne contre elle-même.

    Mais la raison permet de classifier, d’analyser et donc de comprendre…

    Analyser aurait pu être comprendre. Ça l’a même été. Analyser c’est comprendre quand on considère les objets naturels mais quand on touche à ce qui est intouchable alors… il ne faut pas vouloir toucher l’intouchable. Vouloir toucher à ce qui appartient à l’esprit est insensé et mortifère… pour ce qu’on touche et pour ceux qui touchent.

    Je ne vous suis plus. Pourquoi employez-vous le mot « toucher » ?

    Parce que le fait de créer des catégories, de séparer les mots comme s’ils avaient un tant soit peu d’autonomie c’est les traiter d’objets, c’est les rendre concrets et donc « touchables ».

    Les choses de l’esprit sont donc ineffables ?

    Non, elles sont dans un état intermédiaire. Les choses de l’esprit, comme vous dites, doivent toujours être en mouvement. Le mouvement, avec les entrechocs qui s’ensuivent, font que l’esprit est esprit.

    La poésie…

    Si vous voulez. Mais le mot « poésie » a une signification trop technique ou trop générale. Ce qu’on entend par poésie ne peut pas être rendu avec un mot non plus. L’esprit est dans le faire et non dans le dire. L’esprit, contrairement à ce que les hommes pensent, n’est pas abstrait. Regardez-moi…

Dès qu’elle termina sa phrase elle perdit lentement ses formes et une brume légère m’enveloppa et remplit le cube. Je ne sais pas combien le tout dura mais après (je dis « durer » et « après » parce qu’il n’y pas de mots pour indiquer le mouvement hors du temps) elle était de nouveau devant moi. Exactement dans la même position, sans changements sinon que le regard était un peu plus mélancolique, un peu plus seul. Pour reprendre le dialogue je me présentai et je lui demandai qui elle était.

    Qui suis-je ? Si vous m’aviez posé la question quand je vivais en liberté dans les âmes des humains je n’aurais pas pu vous répondre. Je vous aurais dit que j’étais ce que j’étais. Que j’étais tout et rien. Que pour être, j’avais besoin de milliers, de centaines de milliers d’autres Âmiens pour être. Que c’était dans les changements, dans les passages, qu’éventuellement j’étais. Maintenant je suis. Oui, maintenant que je suis presque morte, je peux vous dire que je suis, qui je suis.

    Morte ? Non. Je vais vous sortir d’ici.

    Que vous êtes bête ! Personne ne peut nous sauver, nous les Âmiens. Il est trop tard. Vous avez 2 500 ans de retard. Je suis Sagesse.

    Si vous êtes Sagesse vous ne devriez pas vous laisser abattre par les contingences. Vous savez que…

    Non. Je ne sais rien. « Sagesse » sait seulement quand elle est agglutinée à la folie, à la bêtise, à la colère, à l’amour, à la sollicitude, à la haine…

    Mais vous savez ne pas savoir…

    Quelle bêtise ! Quelle hypocrite prétention ! C’est de là que tout est né : des questionnements pour mettre à nu la signification des mots. Quand on déshabille les mots ont est toujours déçu. Ils sont trop vieux, trop pleins de souffrance, trop insignifiants pris un à un. Vous voyez, dans ce camp, on porte aux extrêmes conséquences ce que Socrate a débuté. On nous isole, on nous rend purs et ainsi on nous tue. Mais, maintenant, on n’a pas d’excuse. On sait tout cela. Ou, on devrait le savoir.

    On sait quoi ?

    On sait que nous isoler veux dire nous tuer. Quand on nous fixe, quand on nous définit, l’âme humaine devient un caravansérail de mots vides qui s’agite pour donner l’impression de la vie.

    Mais, au siècle passé, Freud, Lacan et bien d’autres ont essayé de limiter les dégâts de cette hypersimplification de la raison.

    Peut-être que leurs intentions… mais ils n’ont fait que porter le rasoir de l’analyse là où nous avions essayé de nous cacher après qu’on nous ait chassés de nos lieux ancestraux. Ils ont appliqué les même méthodes. Analyser. Analyser. La compulsion à analyser… la compulsion à analyser est le résultat du sentiment de puissance que la cervification des mots morts donne.

    Vous semblez haïr la connaissance. Mais n’est-ce pas ce qui nous caractérise ?

    Il y a des choses que la connaissance doit respecter.

    Ce que vous dites me fait peur. J’ai l’impression d’entendre un pasteur protestant ou un Imam ou le Pape.

    Oui je hais la connaissance mais pas comme eux : les religions s’opposent seulement en apparence à cette dévitalisation. Ce sont elles qui, une fois qu’elles ont laissé tomber les dieux et ont créé un Dieu, ont dû s’appuyer sur les textes et analyser les paroles. L’esprit a été tué par l’écriture. Par l’objectification du souffle. Mais parler de cela me fait trop mal. Laissez qu’ils me jettent dans leurs fours. Entendez-vous leurs pas ? Ils arrivent

Ils arrivèrent avec leur four portable.

 

Ils sont partout maintenant. Ils circulent orgueilleux parmi nous. Nous sommes tous des analystes, nous voulons tous nous connaître, nous sommes tous sourds, nous sommes tous des RR.

 

12 février 2002. L’heure. Il était six heures du matin et Dante le dit comme cela au début du deuxième chant du Purgatoire : Déjà le soleil était parvenu à l’horizon dont l’arc méridien surplombe Jérusalem de son zénith ; et la nuit qui parcourt un cercle à l’opposé, sortait du Gange en tenant les balances qui tombent de ses mains quand elle domine ; si bien que de ma place je voyais les joues blanches et vermeilles de la belle Aurore devenir orangées. Pourquoi n’a-t-il pas dit, simplement : « il était six heures » ? Parce qu’il est un poète ? Non. Un poète peut tout employer, même des équations mathématiques. Sans doute est-ce parce qu’il n’avait pas de montre et qu’il n’était pas gêné de faire des détours par les images. Des commentateurs disent qu’il a exagéré. Mais comment pouvait-il savoir qu’un jour, pour les hommes, les cieux seraient devenus l’espace d’où avions et satellites auraient chassé Castor et tous ses copains. Et si on voulait, aujourd’hui, dire qu’il est six heures avec des images et par un détour sur terre ? Voilà une tentative : il était l’heure où les Parisiens les plus affamés se pressent vers le restaurant du coin ; et l’ingénieur de Sainte Thérèse se lève pour être au bureau tôt le matin pour ne pas être pris à l’heure de pointe sur l’échangeur Décarie ; si bien que de ma place je voyais le trafic sur la rue saint Laurent reprendre un rythme soutenu après les deux heures de tranquillité qui suivent la fermeture des bars. Baroque et inutile ? Non efficace ? Personnellement je n’ai pas d’idées ; le seule chose que je sais c’est que dans sept cents ans quand il n’y aura plus d’heures de pointe, ni d’échangeur, ni de restaurant du coin, ni de bars, un quidam se demandera pourquoi à notre époque nous avions besoin de connaître l’heure ?

 

13 février 2002. Autre. Elle a lu Rimbaud et elle parle d’elle comme si elle était une autre. C’est dommage.

 

14 février 2002. Les ailes du désir. Que sont des nymphes ? De super-femmes qui hantent les bois, les ruisseaux et la mer et dont Zeus est friand ? Oui. Des courtisanes, des femmes galantes ? Oui. Si vous êtes un mordu du français du XVIIIe siècle, vous avez certainement pensé cela. Des jeunes filles au corps gracieux comme écrit le Robert ? Oui. Si vous avez flirté avec le féminisme vous connaissez le mépris qui habille les nymphettes. Un stade de la métamorphose des insectes (entre la larve et l’imago) ? Oui, et si vous vous intéressez aux sciences naturelles, ça doit être la première signification qui vous est venue à l’esprit. Mais il y a une autre définition que ma mère (pudique comme celle de Brassens) m’a défendu de nommer ici. Je peux vous donner un indice : si j’étais poète, je les appellerais les ailes du désir.

 

15 février 2002. Déçu. E-Mail reçu hier : J’ai trouvé votre paragraphe du 9 février, loin de l’esprit du Trempet. Je l’ai trouvé noir, pessimiste et facile. Un paragraphe qui aurait pu être écrit par les réactionnaires imbéciles que vous visez si souvent. Vous semblez ignorer qu’il y a beaucoup de souvenirs doux et agréables qui aident à vivre et que la mémoire, loin d’ajouter poids aux poids, donne des ailes à la vie. Le paragraphe auquel le e-mail fait référence est le suivant : Pourquoi les vieux perdent-ils la mémoire ? Pour ne pas se faire écraser par le poids de la vie. L’auteur de cette affirmation « noire, pessimiste et facile » étant dans un village perdu de la Mauritanie, je vais essayer de répondre pour elle ; dans son esprit et non dans celui du Trempet car, il existe les esprits du Trempet mais il n’y a pas un esprit « Trempet ». Qui peut douter qu’il y a des souvenirs agréables ? Personne. La mémoire manipule n’importe quel type d’événement et elle ne se gêne pas pour nous étonner avec des souvenirs agréables quand on est déprimé ou de nous donner à mâcher des idées noires dans des moments très gais. Le sens de la phrase était plutôt que, indépendamment de la teneur du souvenir, quand on accumule trop de souvenirs à cause de l’âge, une manière de ne pas s’enfoncer dans le passé (et donc dans la mort) est d’oublier pour continuer à vivre dans l’erreur. Trop simple ? Presque banal ? Sans doute, mais quel est le médecin de l’âme qui a dit que les idées pour être vraies doivent être intelligentes ? Mais si notre lecteur tient à faire des considérations plus intelligentes, il peut toujours s’amuser à essayer de répondre à la question suivante : pourquoi plus les souvenirs sont doux et plus la vie nous écrase ?

 

16 février 2002. Cristallisation. Je n’ai rien contre l’abstraction, contre la « cristallisation des relations logiques ». Je n’ai riencontre, surtout parce que j’aime les cristaux.

 

17 février 2002. Économie. Mon ignorance en économie est si lumineuse[4] que j’arrive même à penser que les pays qui exportent plus qu’ils n’importent sont des pays exploités ! Je vois les États exportateurs comme des individus qui travaillent plus que les autres pour créer des objets qui permettront à ces autres de vivre en travaillant moins. Cette vision naïve de l’économie me permettait de dire que l’Allemagne, le Japon et l’Italie (les pays avec la balance des paiements les plus en actif) étaient ainsi punis pour avoir perdu la guerre. J’étais donc hyper content de lire l’article d’un économiste (Bernard Élie) qui expliquait en des termes très simples pourquoi les Américains tout en ayant depuis 1991 un « déficit commercial qui dépasse 2500 milliards $US » continuent à avoir une monnaie forte. Parce qu’ils sont non seulement un État mais un « banque centrale et une banque de dépôts ». Il ajoute « En théorie économique traditionnelle, le dollar américain devrait s’effondrer pour permettre de résorber ce déficit en favorisant les exportations [plus de travail pour les Américains[5] !] et en décourageant les importations [moins de consommation !] », mais le monde ne semble pas se comporter selon les lois de la « théorie économique traditionnelle » ce qui devrait nous pousser à changer ces lois pour les adapter aux phénomènes économiques ou changer le monde pour l’adapter aux lois. Quelle option théorique prendre ? Si les lois sont « justes » il faut lutter pour changer le monde, si le monde est « juste » il faut changer les lois. Et si ni l’un ni l’autre ne sont justes ? Ou, si « juste » ne veut rien dire dans ce contexte ? Que faire ? Créer « une monnaie internationale » comme dit B. Élie ? Mais comment faire si les États-Unis s’opposent, comme il est clair qu’ils le feront ? À la lumière de mon ignorance je ne peux pas offrir la moindre parcelle d’idée de solution, mais ce que je peux dire c’est que je vois dans cette confusion entre la monnaie d’un État et l’organisation économique internationale un moment du conflit entre l’Empire et les États-nations ou mieux une tentative de l’État-nation le plus fort militairement de devenir l’Empire ce qui montrerait, encore une fois, que la force des armes est supérieure (au moins sur des périodes courtes, de quelques centaines d’années pour nous entendre) à la force de la logique économique, à n’importe quelle logique. En effet, c’est quoi ce vouloir tout expliquer de la raison, cet impérialisme de la logique ?

 



[1] Raisonneurs de la Raison.

[2] Précaution non superflue, car, même si à plusieurs reprises j’avais expérimenté que j’étais invisible, je ne pouvais pas espérer que si j’ouvrais la porte ils ne s’en apercevraient pas.

[3] Les Âmiens n’ayant pas de sexe, leur genre est le genre de leur nom. La suite vous montrera pourquoi j’écris « elle ».

[4] Pire qu’en politique !

[5] Je sais qu’« Américain » comme n’importe quel autre nom de peuple est une simple fiction verbale, surtout quand on parle d’économie, où les diversité à l’intérieur d’un État sont bien plus importantes que les différences entre les « expression verbales » que sont les État.