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4 oct=
obre
2004. Vermeer. La bouche légèrement ouverte, la ligne <=
span
class=3DGramE>des dents à peine dessinée, la langue qu=
i se
montre et ne se montre pas, le regard oblique, le blanc des yeux en
évidence... L’image canonique de Play-boy — avec l’immanquable touche exotique =
: le
turban qui ajoute à cette « brave » fille le
glamour que la publicité extorque de la photographie depuis
qu’elle l’a inféodée. Vermeer, le peintre
photographe, a compris où le désir bat, quelques siècl=
es
avant les magazines pour hommes seuls.
Ce n’est pas que la « =
sensibilité à la
lumière, aux couleurs et à la composition » de=
ce
tableau d’une « be=
lle
jeune fille au turban exotique[1]<=
/a> »
qui rend si célèbre La
fille à la perle. Elle est célèbre et aimée=
surtout
parce que Vermeer y a mis tous les signes que les mâles aiment dans le
visage d’une jeune femelle : les signes qui, en bons signes, ind=
ique
les lieux que la peinture officielle et les mœurs européens n=
8217;étaient
pas encore prêts à montrer. Rien d’étonnant si les
mâles modernes préfèrent l’invitation explicite d=
e la
femme-enfant hollandaise à celle ambiguë de l’autre c&eac=
ute;lébrissime
icône féminine (La
Note en bas de photo : il ne faut pas penser que je veuille
« abaisser » Vermeer et le mette au même niveau=
que
Play-boy ou que je veuille &laq=
uo; élever »
Play-boy aux hauteurs de Vermeer. Je voulais dire quelque chose de tr&egrav=
e;s
simple : mutatis mutandis,=
les
deux titillent la même mâle faiblesse.
5 oct=
obre
2004. Les brodeuses. Si,
comme l’écrivait Proust, il y a des mots chargés de tou=
te
la lourdeur d’une mode, les images et la musique =
ne
sont pas innocentes non plus. Existe-il un individu, occidental, dot=
é
d’une légère couche de culture livresque et de quelques
sous, qui, dans les années 1990, n’a pas aimé la musiqu=
e du
Moyen-âge ? Qui n’a pas été fasciné p=
ar La jeune fille à la perle a=
près
la lourdeur politique des années 1970 ? Parmi ceux qui
étaient dans l’air du temps, y a-t-il quelqu’un qui, dans
les année 1960 n’a pas salivé devant Guernica ou en écoutant
I can get no satisf=
action, ou la Missa luba ?
C’est Les brodeuses, un beau film sans prétention, où
Vermeer fait un clin d’œil gros comme une maison à la
vanité des gens « cultivés », qui mR=
17;a
fait penser à cela.
.
6 octobre 2004 Socrates et les bases de données. En cherchant la date de nais= sance de Sylvie Vartan dans une base de donnée= que je mets à jour depuis des années, je me suis aperçu que l’ordre d’insertion des éléments était loin d’être anodin. Pour moi, bien sûr. Pour me connaîtr= e. Mais, rien n’est plus important du « connais-toi toi-m&eci= rc;me », comme disait le vieux renard grec aux tendances christiques. Rien. Pris dan= s le filet socratique, il y a même ceux qui frétillent en pensant q= ue la seule façon de connaître, c’est de se connaître. Donc, pas de scrupules ! mon vieux. T’= ;as les épaules bien protégées par l’armée maousse des psylosophes. Analyse-toi, comme une petite bourgeoise desséchée là où ça vit ! Vas-y ! cherche les pourquoi soporifiques comme n’importe quel fourbe universitaire.
J’y vais. Viens.
Ça commence avec Byron. Ouh l= ou lou ! Byron en premier ? Ça co= mmence mal, donc bien — pour l’analyse. Byron. Pourquoi Byron ? J= e ne l’ai pratiquement jamais fréquenté : quelques poèmes au lycée et le début du Don Juan, il y a quatre ou cinq ans. Je ne comprends pas…= Je ne trouve pas d’explications… Ne fais pas l’andouille&nbs= p;! Quand on ne trouve pas d’explications, c’est que l’on ne = veut pas en trouver. Fais attention, car tu es sur une mauvaise pente. Trè= ;s mauvaise. Il faut être honnête, avec soi-même. Sonde, son= de. Mieux vaut trouver. N’importe quoi, mais trouve quelque chose à mettre sous les idées. Je sais pas… peut-être… Peut-être ? La seule explication possible… oui je crois que… que l’explication est dans la vanité… une vanité que je ne me connaissais pas. Vanité ? sois concret, ne te cache p= as derrière les mots, des exemples ! des exemples ! Ok, ok, j’y vais : une de mes enseignantes du lycée, il y a deux ou trois ans, m’a appelé « mon splendide Byron». Tu vois, tu te connais un peu plus. Maintenant tu sais que t’es coquet comme un Alain Delon de banlieue.
Le cas Byron n’est que la célèbre exception dont toute régularité a besoin. Ce qui suit est fort normal. Rien &agrav= e; en tirer donc. Vas-y, je ne suis pas sûr. Il n’y a rien de norm= al dans la vie. Rien d’anormal non plus. Donc, après Byron ?= Dans l’ordre :
la famille de V., la mienne, Che Guevara, Brigitte Bardot, Laurence Jourde, Goethe, Proust, Joyce, Baudelaire, Flaube= rt, Dostoïevski, Nietzsche, Chateaubriand, Valery, Ducharme, Dante, Rimbau= d, Mallarmé.
Au début les familles, c’est bien normal, pour un mec très respectueux des conventions. Vaniteux et conventionnel, ça commence bien.
Ça va mal, ça va bien.
Suivent le Che et Brigitte, mes deux mythes des années soixante, mes deux am= ours d’adolescence : celui et celle qui me faisaient vibrer. Partout. Révolution et cul. Pas très original pour un adolescent.
Vaniteux, conventionnel et sans originalité.
Qui suit Brigitte ? Laurence, une amie qui fait partie de la famille élarguée de V. Pourquoi après Brigitte ? Ne me dis pas que c’est parce qu’elles sont nées le mois de septembre. Je ne le sais pas. Laissons en suspens. Question à re-étudier.
Suivent treize écrivains. Paroles, paroles, paroles.
Vaniteux, conventionnel, sans
originalité et livresque.
Un tableau pas très reluisant. Si tu continues, j’arrête. N= e me prends pas pour une nouille, tu sais très bien que je sais que tu ne peux pas arrêter avant d’avoir fini ta journée.
Que dire de ce qui suit ? Que, parmi les treize premiers écrivains,= il y en a huit de langue française et un seul italien. Oses-tu encore m’accuser de chauvinisme[2] ?
Conventionnel, vaniteux, sans originalité mais pas chauvin. Ouf ! pas chauvin ? Pas sûr ; ce qui est sûr, c’est que tu es provincial.
Vaniteux, conventionnel, sans
originalité, livresque et provincial.
Proust précède Joyce. Difficile à croire, mais c’est co= mme ça. Joyce derrière Proust. Du jamais vu. Mais pourquoi ?= Va savoir. Ça va mal, ça va bien. Nietzsche aussi est trè= s en arrière. Pourquoi si loin ? Mon Nietzsche, mon saint Nietzsche. Pardon. Pardonne-moi. Je suis un traître. Mon inconscient de merde préfère les poètes et les romanciers aux philosophes.<= /p>
Vaniteux, conventionnel, sans originalité, livresque, provincial et traître.
Ça va mal, ça va bien. Ça doit être aussi parce que Goethe= est romancier et poète qu’il a eu la première place. Je ne = vois rien d’autre… à moins que ? N’est-ce pas Goet= he qui disait que les hommes qui savent aimer ne sont pas poilus et ont une énorme pomme d’Adam ? Comme lui. Comme moi. Fat.
Vaniteux, conventionnel, sans originalité, livresque, provincial, traître et fat.
Et le vieux catho de Chateau que fait-il en si ins= igne compagnie ? Est-ce parce que Sollers, avant de s’enticher de Saint-Simon, le considérait la plus belle plume de France. Peut-être. Ou est-ce parce que mon fond ca= tholique de merde continue à me coller au cul.
Vaniteux, conventionnel, sans originalité, livresque, provincial, traître, fat et catho.
Ducharme comprimé entre Valéry et Dante. Ça doit faire mal, à Ducharme. Mais c’est mon hommage au Québec. Lèche-cul.
Vaniteux, conventionnel, sans originalité, livresque, provincial, traître, fat, catho= et lèche-cul.
Et Rimmé et Mallarbaud= ? Entre le casse nez et le casanier, j’ai toujours oscillé. Avec= des éloignements de Rimbaud quand Olga m’emmerdait avec l’« Autre c’est moi ». Ou, « moi c’est l’autre » ? Je ne sais p= lus. Ce qui est certain, c’est que moi c’est l’hôte. Jeu= de mots faciles. Frivole, je suis frivole. En résumé :
Vaniteux, conventionnel, sans originalité, livresque, provincial, traître, fat, catho= , lèche-cul et frivole.
.Je me connais mieux, je dois bien l’admettre, et cela grâce &agrav= e; une base de données.
Se connaître, c’est facile : il suffit d’avoir une base= de données et du temps à perdre.
Et Socrate, notre justification à nous tous, comment a-t-il fait ?= Comment a-t-il fait sans base de données ? C’est connu, il ne se connaissait pas.
7 oct=
obre
2004. Louis XVI. Quand
on veut discuter pour discuter, sans espérer de trouver un accord et=
que
l’on ne veut pas parler de Derrida, on peut toujours aborder le rappo=
rt
entre individu et Histoire. S’il n’y avait pas eu Jules
César, est-ce que l’on aurait… ? Si Gengis Khan
n’envahissait pas la Chine est-ce que… ? Est-ce que
Napoléon était une marionnette entre les mains de la bourgeoi=
sie
ou est-ce que son ambition seule a changé le cours de l’Histoi=
re ?
Chacun y va de ses préjugé=
;s. Mes
préjugés sont plutôt côté Histoire et quan=
d un
homme fait des « grandes » choses, j’ai toujours
l’impression qu’il s’agit, tout simplement, de l’ho=
mme
dont l’histoire a besoin. La bourgeoisie française avait besoi=
n du
grand Corse pour freiner les excès de sa révolution, la caste
militaire germanique a inventé Bismarck quand il fallait agrandir
l’espace d’industrialisation, en 2000 l’industrie militai=
re
américaine avait besoin d’un cow-boy…
Mais, quand il s’agit de Louis XV=
I, je
ne réussis pas à ne pas penser le contraire. De penser
qu’il a eu mille occasions pour empêcher certaines dériv=
es
de la Révolution et donc changer le cours de l’Histoire en
évitant, par exemple, l’arrivée de Napoléon et d=
onc
l’invasion de la Russie, la restauration de 1815 et donc les feux de
paille de 1848, la guerre de 1866 et donc celle de 1870, la Première
Guerre Mondiale et donc l’éclosion d’Hitler et du
stalinisme, la Deuxième Guerre Mondiale et donc la création de
l’état d’Israël et la confusion arabe, Sadam Hussein et donc les inutiles débats
intellectuels sur les conflits des cultures… Je suis même
arrivé à penser que c’est à cause de la
nullité de Louis XVI que les indécis me donnent mal à
l’estomac.
8 oct=
obre
2004. Elle. Val=
érie
Toranian, la directrice de la réd=
action
d’Elle, vient de publier =
son
premier livre : Pour en finir =
avec
la femme. Avant de l’acheter j’ai lu l’espèce =
de
manifeste en forme de dédicace qu’elle met en exergue. Plus ou
moins inspirant, mais c’est « [les femmes] qui en ont marre d’être
coupables. Et encore plus victimes » qui m’a convaincu=
. Et,
ça valait la peine.
Un livre léger, agile et qui fai=
t repenser.
Surtout le rapport au pouvoir, des hommes et des femmes. « Être féministe aujourd=
217;hui
pourrait s’illustrer simplement dans l’investissement encore pl=
us
poussé des femmes au cœur de l’entreprise, au cœur d=
e la
société civile, au cœur du politique. À condition=
de
briser le tabou du pouvoir. » Banale, mille fois entendu&nbs=
p;?
Pour certains hommes — pour certaines femmes aussi — une mille =
et
unième fois, ne fait pas mal. Le voile est aussi un enjeu de pouvoir=
, entre
pères et frères et les jeunes filles-s=
339;urs
voilées de soumission. Mais pas seulement. Le voile est aussi une
protection qui permet de prendre la parole et de s’attaquer au pouvoi=
r.
« Ces femmes qui se dise=
nt
féministes de l’Islam, risquent bien un jour d’envisager=
le
féminisme, au-delà de leur pratique religieuse, comme une
intéressante perspective de dépassement de leur condition. »
Ça aussi on l’a déjà entendu. Mais ce qui me sem=
ble
intéressant, c’est que ce soit la rédactrice en chef de=
Elle qui l’affirme. Que la
rédactrice d’une revue de mode écrive de telle chose a =
sans
doute plus d’impacts que ce qu’écrivait la Simone de Sar=
tre.
Et s’il n’y avait pas eu Simone ? C’est vrai. Mais l=
es
lectrice de Elle sont plus nomb=
reuses
et certainement plus dans… dans… dans ce qui bouge que la
majorité des lettrées qui lisaient Le deuxième sexe. Et à propos de sexe «&nbs=
p;le sexe pourrait être le lieu
où se désapprend le plus sûrement la domination masculi=
ne… »
Ça aussi on l’a déjà entendu. Mais qu’est
qu’on n’a pas entendu ?
9
octobre 2004. Modérés. Je ne sais pas s’ils vont tuer les deux journalistes
français prisonniers en Irak. Mais, qu’ils les tuent ou non, c=
ela
ne change rien au jugement que l’on peut avoir sur les influences
néfastes des religions. Pour ne pas les décapiter ils demande=
nt
que l’État français renonce à la loi qui
empêche aux filles de porter le voile à l’école. =
Un do ut des bien normal. L’his=
toire
est remplie des ces jeux d’épiciers sur la peau des gens. Ce
n’est pas ça qui me heurte. Ce n’est même pas
l’importance qu’ils donnent au port du voile. Ce qui me rend
agressif ce n’est même pas qu’ils justifient leur action =
par
le Coran (on peut toujours trou=
ver
dans les Évangiles la
justification du massacre des Juifs, dans la Bible la justification du mur de la honte, dans L’interprétation des
rêves le viol des bébés) ; ce qui me rend vrai=
ment
agressif c’est la position des Musulmans français
modérés. Ceux qui condamnent les ravisseurs et le terrorisme =
au
nom, eux aussi de l’Islam. Du Coran. Pourquoi leur interprétat=
ion ouverte
devrait-elle être la plus juste ? Parce qu’elle est plus
proche de la vision des infidèles ? Drôle de
considération pour des fidèles.
J’ai vu trop de catholiques
« ouverts » dont la fermeture était digne des =
pires
intégristes. Est-ce possible que, dès qu’il y a
transcendance (ouverture vers le haut), il y a fermeture en bas ? C=
217;est
fort possible. Il n’y a pas beaucoup de vrais aut aut dans la vie (même pas ce=
ux des
égorgeurs musulmans), me celui-là a l’air
d’être tout à fait vrai. À moins que l’arna=
que
ne soit haut
et bas.
10
octobre 2004. Interprétation. Dans l’introduction à son « Métamorphoses de la parenté » Maurice =
Godelier met à nu l’histoire de
l’anthropologie de Morgan jusqu’à nos jours avec une
civilité remarquable — et, surtout, une très belle lang=
ue
où les imparfaits du subjonctif sont à l’aise, comme
« cool » « black » et
« nique » dans les chansons rap. Il montre que les
mêmes faits, dans l’arc d’une centaine d’anné=
;es,
ont été interprétés dans des dizaines de
manières différentes. La tentation de dire que les
« faits » n’existent pas est donc très f=
orte.
Et, si on reste dans la parole, c’est vrai qu’il n’y a pa=
s de
faits. Mais l’homme, même s’il est défini comme l&=
#8217;animal
doté de langage, n’est pas que langage. Certes, il est probable
que l’excision soit interprétée différemment par=
une
féministe islandaise ou par une jeune fille soudanaise. Mais ce petit
morceau de tissus ne se réduit pas à des mots. L’orgasme
non plus, ni la mort.
Les extrémistes de
l’interprétation, pour soutenir leur thèse, citent souv=
ent
la mécanique quantique et l’interprétation de
l’école de Copenhague — certains arrivent même
à citer Bridgman. Mai ces extrémiste semblent ignorer que les
fermions ne se voient pas, ne se touchent pas, ne jouissent pas. Les fermio=
ns,
contrairement à la chapelure aux champignons, au cerveau et au clito=
ris,
n’existent que dans les mots.
[1] Catalogue de l’exposition &agrav=
e; la National Gallery<=
/span>
of Art de Washington de l’hiver 1996.
[2]
Je pourrais aussi ajou=
ter que
les cinq écrivains qui suivent Mallarmé sont tous des
Français et que la série française est interrompue par
deux russes : Bakounine et Pouchkine